Pierre-Arnaud Chouvy / 2008 / Sécurité globale.
La longue crise afghane et ses multiples rebondissements ont été accompagnés par la croissance progressive de la production illicite d’opium dans le pays. D’une centaine de tonnes au début des années 1970, la production a augmenté jusqu’à atteindre 6 100 tonnes en 2006, soit 92 pour cent de la production illicite mondiale selon les Nations unies. Au cours de l’histoire moderne, la production d’opium a toujours été liée à des considérations et à des enjeux sécuritaires, que ce soit à travers des menaces supposément portées à l’ordre moral, ou à travers son instrumentalisation stratégique lors de nombre de conflits armés. Dans le cas de l’Afghanistan, l’opium a très tôt fait l’objet d’utilisations stratégiques, d’abord dans le cadre de la guerre froide, puis dans celui des guerres intestines qui ont ravagé le pays pendant près de vingt ans. Désormais, dans le contexte de la lente et difficile reconstruction du pays, tant politiquement qu’économiquement, les proportions prises par la production d’opium soulèvent nombre de questions sécuritaires classiques, souvent sans prendre à sa juste mesure la dimension globale de la sécurité de l’Afghanistan. De fait, sécurité stratégique et sécurité économique apparaissent inextricablement liées dans l’équation de la production afghane d’opium.